Le mois de novembre a été marqué par l'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis et la nouvelle baisse des taux directeurs par la Fed, qui envisage une troisième réduction en décembre. À la suite de la victoire de Trump, les taux US à 5 ans ont finalement baissé de 10 bp, après une hausse temporaire marquée. En Europe, les taux se sont resserrés de manière significative avec -34 bp sur le 5 ans allemand, alimentés par des inquiétudes croissantes concernant la santé économique de la zone euro et des attentes accrues de baisse des taux par la BCE en décembre.
Stratégie High Yield
La Fed a poursuivi son cycle de baisse de taux en effectuant une deuxième baisse en novembre, à seulement -25bp (contre -50bp en septembre) mais qui sera probablement suivie d’une troisième du même ordre en décembre. Si pour l’instant les anticipations sont toujours pour une poursuite de la baisse en 2025, le rythme semble plus incertain avec d’un côté la tendance inflationniste créée par les tarifs douaniers potentiels de Donald Trump et de l’autre côté la bonne tenue de l’économie américaine qui appellerait finalement à baisser les taux moins rapidement. Ainsi, pour le mois de novembre, les taux US ont finalement baissé de 10bp sur le 5 ans après une hausse temporaire très marquée suivant la victoire de Donald Trump. De notre côté de l’Atlantique, l’élection de Donald Trump a jeté un froid, le marché craignant l’impact des tarifs sur l’économie Européenne en général et sur les exportations allemandes en particulier. En conséquence de ces craintes grandissantes, les taux se sont bien plus resserrés qu’aux Etats-Unis (-34bp sur le 5 ans allemand) et les anticipations de baisse des taux de la BCE se sont accentuées (une de plus attendue dans un an que le mois dernier)
Le crédit, et en particulier le High Yield, continue d’être soutenu par des facteurs techniques : les rendements toujours attractifs attirent les flux de souscriptions. Les fonds HY aux US continuent d’enregistrer des souscriptions importantes avec 2.9Mds$ ce mois-ci contre 1.9Mds$ le mois précédent. La dynamique reste également positive en Europe avec 0.9Md€ de souscriptions sur les fonds HY en novembre (portées par les fonds standards, i.e. hors ETF qui ont perdu 0.4Md € sur la même période après un mois record de souscription de 1.45Mds € en octobre).
Tout comme le mois dernier, nous observons une divergence entre les segments de notations entre l’Europe et les Etats-Unis. Alors qu'outre-Atlantique, le resserrement des spreads a été d'autant plus marqué que la notation était spéculative, le phénomène inverse s'est observé en Europe : le CCC affiche une performance négative (-1.3%) impactée par la dégradation des perspectives économiques alors que les BB profitent de la baisse des taux (+0.65%) et que les B maintiennent également une bonne performance (+0.62%) grâce à une demande soutenue pour le HY.
Du côté américain au contraire, les notations les plus risquées surperforment dans une envolée générale (BB US : 0.85% ; B US : 0.99% et CCC US : +1.32%). Les investisseurs espèrent que la politique "America First" aura un effet bénéfique sur l'économie américaine et restent donc plus enclins à investir dans des sociétés plus spéculatives.
Nous continuons de profiter des opportunités du marché primaire en cette fin d’année. Ainsi nous avons encore réduit notre sous-pondération dans les secteurs de l’automobile, qui offre des primes intéressantes après la récente correction et dans le secteur de l’immobilier qui continue de voir les valorisations des actifs se redresser après une longue période de repli. Enfin, nous restons sélectifs sur les secteurs les plus cycliques en n’augmentant pas nos pondérations sur ces derniers. À la suite du fort mouvement de taux, nous avons légèrement augmenté la duration de nos portefeuilles.
Le pic de défauts en Europe bientôt (et déjà) derrière nous
Les taux de défauts ont augmenté en 2024, avec un pic (en notionnel) à 2.8% en Europe atteint en septembre dernier. Fait plutôt rare, la divergence des défauts entre le High Yield US et Euro s’est inversée cette année avec un taux plus élevé en Europe pour la première fois depuis la crise de la zone Euro sur la période 2011-2013. Aujourd’hui, l’écart entre les deux zones est de 1.3pt plus élevé en Europe tandis qu’il était de -1.2pt en moyenne sur la décennie passée. La principale raison est liée à la composition plus spéculative de l’univers du High Yield américain et la prépondérance de secteurs cycliques comme l’Energie et l’Industrie de base.
Alors que l’on constate une stagnation des défauts autour de 2.7% en Europe depuis septembre, la tendance pour les prochains mois devrait être à la hausse et atteindre 5.0% ; faut-il s’en préoccuper ? Non, au regard de l’évolution des primes de risque HY qui se sont contractées de 65bp depuis le début de l’année, malgré un écartement de 24bp sur le mois, ainsi que de l’évolution de la part des crédits stressés (sous 80% du pair) qui continue de baisser à 5.6%, dont seulement 1.5% sous 60% (vs. un plus haut à 5.1% sur trois ans). La réponse est purement technique, c’est-à-dire que les primes de risques actuelles du High Yield EUR intègrent déjà deux défauts majeurs à venir sur des structures de capital importantes : Altice France (SFR) (5.9Mds EUR) dans les télécoms et Thames Water (2.8Mds sur les souches EUR) dans les services aux collectivités au Royaume-Uni. En effet, ces deux émetteurs ont déjà entamé les discussions avec leurs créditeurs et l’issue de la restructuration devraient aboutir à une coupe de 20-25% de la dette, tels que reflétée par les prix actuels des obligations senior. Cela devrait compter pour environ 3.5% des défauts dans les mois qui viennent une fois que la restructuration sera officiellement actée. Si l’on exclut ces deux derniers, les défauts sur 2025 sont attendus en baisse par les principaux stratégistes, soit autour de 1.5%.
Nous ne craignons pas de risque de défauts induit par un problème de liquidité : le marché primaire a nettement rebondi en 2024 à 117Mds€ (+113% vs. 2023), permettant d’adresser le mur de maturités 2025 et 2026 encore redouté un an auparavant. Ainsi, les émetteurs ont été proactifs sur les maturités 2026 qui ne représentent plus que 17.8% de l’indice HY Euro corporate, dont seulement 7.1% avec une échéance de 12 à 18 mois, qui correspond sur le HY au délai moyen maximal de refinancement avant la maturité finale. Cette cohorte d’échéances courtes ne soulève pas de risque de défaut majeur, puisque composée à 80% de BB qui vont prolonger au maximum les faibles coupons (3.0% en moyenne), et ne comptant seulement qu’un émetteur stressé avec un risque élevé de refinancement (0.04% de l’indice) et enfin trois émetteurs (0.4% de l’indice) présentant un risque de restructuration déjà engagée et intégrée par le marché au vu du prix des obligations entre 90 et 95% du pair. Le risque de défaut sur l’ensemble des échéances 2026 est à peine plus élevé : 0.6% de l’indice présente un risque élevé de défaut mais un taux de recouvrement élevé de 70% (entre 43 et 83%) ; 1.2% de l’indice sont susceptibles ou ont déjà engagé une restructuration et affichent également un taux de recouvrement élevé de 85% (entre 55 et 95%).